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Evangelii Gaudium ou la gravité de la joie


Explication d’Evangelii Gaudium.

Lire Evangelii Gaudium – explication de ce texte dense, original et “bouleversant”.

Evangelii Gaudium ou La Gravité de la Joie

Le film « Gravity » est un des grands succès du box-office 2013 : près de 4 millions de spectateurs ont déjà vibré à la vertigineuse dérive spatiale de Sandra Bullock et Georges Clooney.

C’est une expérience un peu semblable qui attend le lecteur d’Evangelii Gaudium, la 1ère exhortation apostolique du Pape François : un texte qui bouleverse tout d’abord les repères de notre espace ecclésial, tant sur la forme que sur le fond. Sa taille, déjà, est hors du commun : Près de 290 paragraphes, soit plus que les 2 principales exhortations apostoliques de Benoit XVI, sur la Parole de Dieu et sur l’Eucharistie, réunies ! Mais c’est son style et son ton, surtout, qui font de ce texte une sorte d’O.V.N.I au milieu des documents comparables du Magistère : le pape nous livre un propos libre et spontanée, teinté d’humour, toujours direct, et surtout empreint de gravité.

« Gravité » comme le centre du même nom : On mesure un peu plus en lisant Evangelii Gaudium le changement d’équilibre ecclésial induit par l’élection du premier pape des Amériques. L’Europe n’est clairement pas le centre de gravité de sa réflexion. Qu’il s’agisse du défi des nouvelles cultures urbaines (§71-75), ou de « l’art de vivre » en Eglise (§268-274), la pensée du pape s’appuie sur des expériences humaines et communautaires différentes de celles que nous connaissons, sans pourtant nous être étrangères. Une part de la fraîcheur de ce texte vient de là : de ce qu’il nous invite à voir le monde et l’Eglise d’ailleurs que de la petite fenêtre qui nous est si familière.

« Gravité » comme « urgence », aussi : le ton du pape se fait plus incisif lorsqu’il s’agit de décrire ou de dénoncer certaines logiques de notre monde. Non à une économie de l’exclusion, qui ne se contente plus d’exploiter les uns ou profit des autres, mais qui va jusqu’à faire de certains des déchets sans valeur sociale ! (§53-54) Non à la nouvelle idolâtrie de l’argent, véritable fétichisme de notre temps ! (§55-56) Non à l’argent qui gouverne au lieu de servir ! (§57-58) Non aux disparités sociales qui engendrent la violence ! (§59-60). C’est lorsqu’il évoque les tentations qui menacent l’Eglise et ses pasteurs que le pape se fait le plus cinglant. (§76-109) : individualisme pastoral, « psychologie de la tombe », pessimisme stérile, mondanité spirituelle, conflits et jalousies internes…rien ne manque !

« Gravité comme « loi », enfin : là est le cœur et l’essentiel du propos de François. Il s’efforce de montrer que la Nouvelle Évangélisation ne consiste pas tant dans une stratégie de reconquête que dans l’expression d’une sorte de loi de gravitation évangélique : Plus l’Eglise accepte de se décentrer d’elle-même, pour renouveler sa rencontre avec le Christ, plus elle trouve la joie ; Plus les chrétiens prennent goût à s’impliquer dans le monde, à partager la vie des plus pauvres, et plus ils sont semeurs de joie. C’est finalement cette « gravité de la joie » que le pape expose dès l’introduction de son exhortation (§2-18), et développe ensuite à travers un certain nombre de thèmes particuliers.

C’est en s’enfonçant plus loin encore dans l’immensité terrifiante de l’espace que les 2 héros de « Gravity » trouveront le moyen de rentrer sur Terre. Il en est de même pour l’Eglise, nous dit François : « Sortons, sortons pour offrir à tous la vie de Jésus-Christ : je préfère une Eglise accidentée, blessée et sale pour être sortie par les chemins plutôt qu’une Eglise malade de la fermeture et du confort de s’accrocher à ses propres sécurités. » (§49)