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L’accompagnement spirituel


L’appel à la sainteté ne se vit jamais seul. Pour le vivre, Dieu nous donne des frères et des sœurs. Parmi ceux-ci, l’accompagnateur spirituel nous aidera à discerner la volonté de Dieu sur nos vies.

A quoi sert un accompagnateur ? Comment trouver un accompagnateur spirituel ? L’accompagnateur spirituel doit-il être un prêtre ? Psychologue ou accompagnateur spirituel ? Pour suivre ce chemin, quelle attitude de cœur développer ? De quoi faut-il parler ? Quelle place pour la Bible dans l’accompagnement ? Etre guidé, n’est-ce pas perdre son indépendance ? Peut-on changer d’accompagnateur spirituel ?

A quoi sert un accompagnateur ?

La foi est une histoire personnelle. Dans cette aventure spirituelle, il est bon de ne pas rester seul. Car la vie chrétienne est une vie fraternelle. “Un chrétien qui reste seul est un homme en danger de mort”, dit-on souvent avec raison. Avoir un guide et un compagnon dans cette aventure spirituelle est utile, parfois nécessaire, pour mieux la vivre en vérité, pour discerner ce qui est bon pour nous, pour éviter de prendre de fausses pistes ou de rester dans l’illusion. Chercher et réaliser la volonté de Dieu à tout instant représente un travail sérieux. Efforts, peines et joies sont au rendez-vous. Trouver un frère ou une sœur qui puisse éclairer ce que nous vivons, est une aide précieuse : pour “durer” dans la grâce, pour que l’aventure ne soit pas un feu de paille ou l’émotion d’un instant, pour que ce chemin soit vraiment de sainteté.

Cet accompagnateur spirituel est témoin de l’action progressive de Dieu en nous. Parfois, il nous met librement sur la piste de nombreuses découvertes. Il est mémoire aussi des dons que chacun reçoit et que l’on oublie si facilement. En regardant le chemin parcouru, il nous indique notre propre fidélité à la grâce reçue. Il fait mémoire de notre vocation et des appels que Dieu nous adresse. Il nous aide à grandir « en âge et en sagesse », en évitant certains écueils ou impasses. La vie de tous les saints est traversée de ce type de rencontre fraternelle qui stimule, conseille, ramène à l’essentiel, console, ouvre de nouveaux horizons. Un tel accompagnement nous conduit à mieux vivre en vérité avec nous-mêmes, avec les autres, avec Dieu. Il est une aide, un repère pour discerner le vrai du faux, pour connaître la volonté de Dieu, pour donner à notre aventure spirituelle un dynamisme permanent et une dimension éternelle.

L’accompagnateur spirituel n’a jamais vécu exactement la même situation que nous, car chacun est unique et les événements ne se répètent pas de manière identique. Cependant, qui dit expérience et sagesse, dit qu’il a franchi certaines difficultés aussi. Lorsqu’on escalade une paroi, il y a des prises qui n’apparaissent pas au premier coup d’œil. Si quelqu’un d’expérimenté crie “à gauche”, “à droite”, “en aplomb”, une force entre en nous et nous anime à continuer et à forcer tel passage difficile. Ce n’est pas l’accompagnateur qui monte à notre place, mais il nous a mis sur la bonne piste.

Comment trouver un accompagnateur spirituel ?

Dans les activités et les rencontres, sois attentif aux personnes qui te semblent proches de Dieu et enraciné dans l’Église. Observe le désir de te confier qui grandit en toi. Prends conseil. Demande-le à Dieu dans la prière. Pose des questions autour de toi. Réfléchis et profite des situations inattendues et des événements de l’Eglise.

Un jour ou l’autre, il faut s’adresser à telle personne et le lui demander. Chacun à sa manière : de vive voix, par téléphone, par émail, par lettre… La personne choisie doit savoir ce que tu attends d’elle. Il s’agit d’exprimer ton désir et de tomber d’accord si possible sur un rythme de rencontre. Écoute aussi ce que cet accompagnateur peut faire pour toi et sois fidèle à ta propre parole. S’il refuse, il te donnera certainement d’autres pistes.

Tu ne trouveras jamais l’accompagnateur “parfait”. Ils sont tous pécheurs. Ils auront tous des défauts, parfois fort visibles. L’essentiel, c’est qu’il soit à l’écoute de ton chemin, qu’il te mène au Christ : qu’il ne soit ni sourd ni aveugle mais saint et sain…

L’accompagnateur spirituel doit-il être un prêtre ?

Non. Selon la tradition de l’Église, cette mission est aussi confiée à des hommes et des femmes, religieux ou laïcs, ayant une profonde vie intérieure en ville ou dans les monastères.

Guider spirituellement ses frères et sœurs est d’abord un fruit de la grâce baptismale. Certains chrétiens ont reçu ce don de l’Esprit-Saint. On sait qu’ils sont de bon conseil, qu’ils vivent de leur mieux leur amitié avec le Seigneur, qu’ils acceptent de consacrer du temps aux autres de cette manière. Bien sûr, ils doivent avoir approfondi leur foi par la prière, l’étude et le service. Il n’est pas nécessaire qu’ils soient de grands savants.

Même si ton accompagnateur n’est pas un prêtre, il est bon qu’il te connaisse vraiment de l’intérieur, jusque dans l’épreuve de tes tentations. Il peut être le confident de tous les événements de ta vie.

Psychologue ou accompagnateur spirituel ?

Il s’agit de deux écoutes différentes.

Le psychologue et le psychanalyste suivent une démarche scientifique. Leur pratique médicale vise à aider les personnes à retrouver une maîtrise d’elles-mêmes, à dépasser certaines angoisses, à soigner et guérir des maladies importantes.

L’accompagnateur spirituel écoute la personne sous la lumière de Dieu et dans son unité personnelle ; il considère comment la liberté, telle qu’elle est, se dispose à la volonté et à l’action du Seigneur. Le regard posé est celui de la foi : Dieu agit, parle, guérit et appelle son enfant. Il convient d’être avant tout attentif aux mouvements profonds du cœur et à l’histoire sainte du sujet.

Ces approches distinctes peuvent se compléter. Tandis que le psychologue cherche à faire disparaître un mal-être, l’accompagnateur spirituel aide à trouver son sens et à porter avec le Christ blessures et fragilités. Des situations de souffrance sont parfois intimement liées au devenir spirituel de la personne.

Pour suivre ce chemin, quelle attitude de cœur développer ?

On ne demande pas un accompagnement sans prendre la décision d’avancer soi-même. Petit abécédaire des engagements à prendre :

  • Agenda : bien noter les rendez-vous, être à l’heure : le temps est précieux. La ponctualité est signe de sérieux.
  • Bible : vouloir fréquenter les Ecritures Saintes car Dieu y parle. Évoquer les questions et sentiments suscités par la lecture et la prière.
  • Confession : fixer avec son accompagnateur un rythme et s’y tenir ; le pardon de Dieu est décisif.
  • Docilité : être prêt à suivre l’un ou l’autre conseil. Sinon, à quoi bon aller voir un médecin pour ne pas suivre son traitement ?
  • Ensemble : ne rien décider d’important sans mettre dans le coup l’accompagnateur (rencontre, coup de fil, prière, …)
  • Eucharistie : le dimanche bien sûr, et pourquoi pas en semaine si possible ?
  • Préparation : avant la rencontre, penser à ce qu’il est important d’aborder. Notamment les événements marquants, et les décisions à prendre.
  • Prière : Vouloir prier. Garder fidèlement ce désir. En parler.
  • Réflexion : relire les événements, pour mieux comprendre ce que l’on vit. Un “carnet de route” peut être utile pour y inscrire réflexions, questions, affections, sentiments, grâces reçues.
  • Spirituel : c’est de toi et de Dieu qu’il est question. Éviter les discussions hors sujet.
  • Temps : décider de consacrer du temps à la prière, à des lectures spirituelles, à des périodes de récollection.
  • Transparence : dire la vérité et l’essentiel de sa vie sans se réfugier derrière des mots ou tourner autour du pot. Déplier les plis de son cœur avec confiance, pudeur et discrétion. Bien sûr, un temps d’apprivoisement est nécessaire.

De quoi faut-il parler ?

Tout ce que tu es et tout ce que tu fais concerne Dieu. N’oublie pas d’observer ce que tu vis.

  • Ta prière
    C’est un moment privilégié de ta rencontre avec Dieu. Avec ton accompagnateur, évoque ta manière de prier, ta fidélité ; il te soutiendra et te conseillera. Mais surtout, il t’aidera à discerner ce que le Seigneur te dit : les inspirations, les sentiments, les désirs et les craintes qui surgissent dans ta prière viennent-ils de Dieu ? Apprends à raconter ce qui s’est passé concrètement dans ta prière ; fais-le de mémoire ou mieux avec un mini-carnet.
  • Tes pensées et désirs
    D’où te viennent certaines idées constantes ou ponctuelles ? Il est essentiel d’aborder cette question pour grandir humainement, discerner et progresser dans la vie spirituelle. Cherche et découvre la source originelle de tes désirs pour éviter les illusions et faire du désir un dynamisme de ton amour de Dieu et des hommes.
  • Ta famille
    Elle est le premier terreau de ton existence. En elle, tu vis à la fois des choses formidables et décevantes. Comment y faire le bien comme Jésus ? Et tant d’autres choses à évoquer qui te façonnent et t’engagent …
  • Tes études ou ton activité professionnelle
    Comment sanctifier tout ce temps passé ? Unifier et donner du sens à tes études ? Être utile, honnête et créatif dans ta profession ? Servir le Seigneur ? Le sens de ce que tu fais est à découvrir dans le plan de Dieu sur le monde.
  • Tes moments de détente
    Détente, sport, culture, style de vie, amitié, argent … Autant de choses que l’on fait avec Jésus ou sans lui. Les questions sont complexes et il est bon d’y réfléchir et d’en parler.

Quelle place pour la Bible dans l’accompagnement ?

Jésus est le Verbe de Dieu. Il est la Parole. Le connaître et l’aimer, c’est connaître et aimer l’Ecriture. Qui ignore l’Ecriture, ignore le Christ, dit saint Jérôme. Ainsi, avoir une Bible, la lire avec passion, prier avec les paroles et les gestes du Christ, voir les questions brûlantes que la Parole de Dieu te pose dans ta vie concrète : autant de points concrets du dialogue avec ton guide spirituel. La langue de la foi passe par la mémoire de l’histoire sainte qui devient la nôtre. Tu acquiers dans la Bible les mots pour dire en vérité ton expérience spirituelle et la partager. La Parole de Dieu structure vos échanges, les rend vrais, compréhensibles, vivants. Si tu veux « voir » Dieu, apprends à parler avec ses mots.

Etre guidé, n’est-ce pas perdre son indépendance ?

La liberté passe par les autres : seul celui qui peut donner sa vie aux autres est vraiment libre. C’est donc “au nom de la liberté” que tu peux décider de suivre l’avis d’autrui, de t’en remettre à son conseil, de lui faire confiance au point parfois de suivre son avis plutôt que le tien. Tout est question de confiance.

Précisément, dans l’Église, nous suivons tous le Seigneur qui est le chemin, la vérité, la vie. Accepter de dépendre des autres n’a de sens que dans l’amour et pour l’amour du Christ. Tout autre motif ne tient pas debout.

Peut-on changer d’accompagnateur spirituel ?

Bien sûr ! La liberté de chacun est entière.

Comme Jean Baptiste, l’accompagnateur spirituel s’efface devant le Seigneur et devant son action en nous. Il respecte celui ou celle qui veut trouver lumière et force avec un autre frère.

Mais qui dit liberté dit responsabilité. On ne change pas par caprice. On ne cherche pas à en avoir plusieurs. Tout changement doit faire l’objet d’une réflexion et d’une prière. Des difficultés ne signifient pas nécessairement qu’il faut changer : elles peuvent être le signe d’un combat spirituel. Il ne faut pas oublier de “tabler sur le temps” pour voir les fruits d’un accompagnement.

L’accompagnateur n’est pas un gourou !

Un gourou est séducteur ; il enchaîne celui qu’il dirige, par divers liens affectifs. Il cherche à attirer vers son groupe celui qu’il prétend aider. Celui qui le suit perd alors sa clairvoyance et sa liberté : fasciné, il obéit sans décider par lui-même.

L’accompagnateur spirituel n’est pas un gourou. Il sait bien qu’il n’a pas toute la vérité. Il se met au service du travail de Dieu dans les cœurs. Il soutient celui qu’il accompagne sur le chemin qui est le sien. “Ne compte pas sur moi pour te dire à ta place ce que tu dois faire !”, telle est son attitude fondamentale. C’est le baptisé qui choisit dans le Seigneur et qui parcourt son chemin.

Que penser de l’amitié dans l’accompagnement ?

Le plus souvent, ce n’est pas un ami que tu choisis au début de la relation. Tu fais connaissance et tu te confies à telle personne dans l’Eglise. L’amitié peut naître mais elle n’est jamais automatique. Le respect, l’estime, l’admiration, la confiance vont surgir et imprégner vos rencontres. S’apprivoiser et respecter la mission l’un de l’autre deviennent des chemins d’amitié. « Je ne vous appelle plus serviteurs, mais amis », dit Jésus à ses disciples. Pourquoi ? Parce qu’Il leur communique ce qui vient du Père. Ainsi l’amitié peut-elle fleurir dans l’accompagnement quand ce qui est partagé vient de Dieu et reste en Lui. Ce chemin peut faire de vous des « amis dans le Seigneur ».

Père Alain Mattheeuws s.j.

(D’après Vocations Ile-de-France n° 166, avril 2008 ; et dans le guide du pèlerin (Ile-de-France) pour les XXIIIèmes Journées Mondiales de la Jeunesse.)