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La figure du prêtre au cinéma


Pour réfléchir à la vocation de prêtre, le cinéma nous donne à voir des figures très diverses. Il sera parfois source de moqueries mais le souvent le représentant du Sacré. Voici quelques suggestions (non exhaustives !) d’extraits et de films entiers qui permettront de s’interroger sur telle ou telle facette de prêtre et sur la manière dont on parle de l’Eglise le cas échéant.

Le prêtre a clairement un statut ‘à part’ dans le cinéma. Au départ, simple élément du décor social dont les cinéastes n’imaginaient pas faire un premier rôle, le personnage de prêtre prend petit à petit de la densité.

 

Le pasteur affectueux et familier

L’extrait choisi dans ce premier film de 1952 d’une série de 5 longs métrages, Le petit monde de Don Camillo, nous présente le nouvel élu du parti communiste à la mairie du village,Peppone, que Don Camillo regarde passer avant de rentrer dans son église pour s’adresser au grand crucifix. Et celui-ci lui répond !

Au delà de la note d’humour, la position de la caméra donne de l’ampleur à ce dialogue insolite avec beaucoup de respect. La foi de Don Camillo est montrée comme solide, confiante, pleine de bon sens. Dès le début du film, s’adresser à Dieu est naturel, simple et pourtant sans concession.

Don Camillo est une figure de prêtre qui prend soin de ses ouailles, qui les connaît et qui milite pour la paix…même si cela doit se faire de façon musclée. Une profonde humanité se dégage donc, dans un après-guerre où les idéologies vont bon train.

L’extrait à voir ici

Le prêtre éducateur

Le jeune vicaire du film La route semée d’étoiles / Going my way de Leo McCarey (1944), vient de prendre son nouveau poste. Il est prêtre éducateur. Dès le début du film, son lien aux enfants est montré et il s’occupera des jeunes par le biais du chant en chorale et de la musique. L’extrait à voir ici de 3’40 à 8’25

Dans cet extrait, la figure qui nous est montrée est celle d’un homme qui va à la rencontre, sensible au plus fragile, homme respecté, sans moyen financier. L’apparence est très importante dans cette société du début du XXe siècle.

Bien des films évoquent cette figure du prêtre éducateur comme encore tout récemment le film Nostalgia de Mario Martone (2022).

Le serviteur des pauvres

Un autre type de figure est le prêtre au service des plus pauvres. C’est la charité à l’œuvre qui est le moteur du récit.

Les films Monsieur Vincent de Maurice Cloche (1947) ou Hiver 54 de Denis Amar (1989) ont saint Vincent de Paul et l’abbé Pierre comme personnage principal.
Ils ne travaillent pas seuls, mettant en route d’autres personnes pour gérer l’intendance et la créativité de leur œuvre. Ils apparaissent comme des personnages passionnés, entiers, profondément proches de l’humain.

Le film à sortir en novembre 2023, L’abbé Pierre une vie de combats de Frédéric Tellier en donnera un éclairage ‘contemporain’.

L’intermédiaire entre Dieu et les hommes

Voilà une facette particulière qui se dégage sur l’ensemble d’un film rendant impossible le choix d’un court extrait pour montrer ce côté un peu surnaturel de l’homme de Dieu.

Des films comme Le journal d’un curé de campagne de Bresson (1951) ou Sous le soleil de Satan de Pialat (1987) s’intéressent plus en détail aux états d’âme de jeunes prêtres témoignant de leur vie intérieure, de leur lutte contre le mal… La résurrection d’un enfant mort dans Sous le soleil de Satan donne une aura particulière au prêtre.

A noter que la mise en scène d’une quête mystique est un travail d’artiste cherchant à rendre visible l’invisible.

Le rapport au pardon, à la réconciliation habite de nombreux films. Dans son film Gran Torino, Clint Eastwood (2008) donne place à un second rôle de jeune prêtre remarquable. Regarder la séquence d’ouverture avec l’homélie des obsèques de l’épouse du héros puis la séquence finale des obsèques du héros lui-même : elle montre un jeune prêtre qui a su prendre sa place, écouter avec humilité. Il est fidèle à la promesse faite à l’épouse de confesser le mari. C’est la persévérance du bon pasteur qui cherche sa brebis perdue inlassablement.

L’homme engagé

Dans Mission de Roland Joffé (1986), la figure du prêtre évangélisateur est mise en avant avec une forte énergie déployée, un souci d’inculturation. Il vit parmi le peuple autochtone et a su y faire sa place. Des gestes forts viennent donner une épaisseur au film : par exemple dans Mission, la sortie de l’église en feu avec le prêtre brandissant l’ostensoir alors que les tirs fusent dans tous les sens. La violence est largement présente et il faudra faire la part des choses avec la vérité historique.. On retrouve le même type de problématique dans Silence de Scorsese (2016).

Dans cette catégorie de film, autour de pages d’histoire, on pourra trouver d’autres figures engagées comme le prêtre du Vatican dans La Pourpre et le noir qui saura risquer sa vie pour sauver des Juifs en pleine seconde guerre mondiale.

En écho aux questions de société

Après mai 1968, les réalisateurs ont mis en scène des prêtres défroqués avec ou sans liaison avec une femme ; d’autres ont abordé la question de l’homosexualité. Liberté et célibat sont mis en contradiction. Le sens du célibat est soit  simplement interrogé, soit totalement dénigré.

On se souvient des comédies comme La vie est un long fleuve tranquille d’Étienne Chatiliez (1988) ou Qu’est-ce qu’on a donc fait au bon Dieu ? de Philippe De Chauveron (2014)  ; les prêtres n’y tiennent que des petits rôles secondaires. On peut aussi mentionner Habemus papam de Nanni Moretti (2011) qui interroge la figure peu mise en scène du pape.

Plus récemment, c’est la lutte contre les abus sexuels qui mettra en scène quelques figures de prêtres ; on peut citer notamment Grâce à Dieu de François Ozon (2018) ou Les éblouis de Sarah Suco (2019). Le prêtre usurpateur est aussi dépeint comme dans La communion de Jan Komasa (2019) avec une très belle réflexion sur la réconciliation.

L’Apparition de Xavier Giannoli (2017) permet de questionner la posture de l’Eglise par rapport aux apparitions mariales et possibles miracles… Cela permet aussi de souligner le rapport à la hiérarchie dans l’Eglise catholique dès le début du film.

 

Dans Reste un peu de Gad Elmaleh (2022), on ne voit le prêtre que dans les quelques scènes où il échange avec le candidat au baptême. Le prêtre est ici celui qui fait le lien à Dieu à travers les sacrements.

 

Quelques constats :

Le prêtre reste une figure présente dans les films récents, figure de référence dans des situations bien diverses, souvent dans des rôles ponctuels, secondaire dans les scénarios. Le voir majoritairement dans sa pratique des sacrements est-il à interpréter comme un homme à part, tiraillé par l’ampleur de sa mission, restant disponible pour donner les sacrements et moins pour faire partie de la vie des gens, vivre avec eux ?

Anne Dagallier, juillet 2023

Préparé à partir de :

La figure du prêtre au cinéma

Le prêtre au cinéma, un héros à part

Le prêtre imag(in)é, une émasculation symbolique du clergé catholique dans le cinéma français ?