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10 ans de Laudato si’ : renouveau théologique & pastoral et perspectives pour un diocèse « pionnier de l’écologie intégrale »


Le 27 novembre 2025, environ 80 personnes, laïcs, religieux et membres du clergé du diocèse des Yvelines, se sont réunies à l’initiative du Service Diocésain de Formation en Yvelines et de la Pépinière Laudato si’ pour commémorer le 10ᵉ anniversaire de l’encyclique Laudato si’ du pape François. Cette journée visait à prendre acte du renouveau théologique et pastoral induit par ce texte tout en imaginant des pistes concrètes pour faire du diocèse un acteur pionnier de l’écologie intégrale. L’événement a combiné enseignements théoriques le matin et ateliers de cocréation l’après-midi, animés par des formateurs du CERAS.

Synthèse des enseignements

  1. Monseigneur Luc Crepy : l’urgence d’une posture évangélique

Monseigneur Crepy a ouvert la journée en soulignant l’urgence écologique comme une question de justice sociale et de responsabilité collective. Il a rappelé que l’écologie intégrale, introduite par Laudato si’, fait désormais partie de la Doctrine Sociale de l’Église. Pour lui, l’Église locale doit agir de manière transversale, en impliquant tous ses services et paroisses, notamment via des initiatives comme la Pépinière Laudato si’ ou Église verte. Il s’agit d’encourager une réflexion croisée pour répondre « aux clameurs de la terre et des pauvres ». L’évêque a insisté sur la créativité des associations caritatives, l’importance de mieux vivre le temps (y compris dans la contemplation de la Création) et de consommer de manière plus responsable. Enfin, il a relevé la symbolique forte du Jubilé Pèlerins d’espérance, qui coïncide avec l’anniversaire de la parution de l’encyclique. Il a appelé à une conversion écologique, à la solidarité entre les continents, et à la responsabilité envers les générations futures.
=> Vidéo à venir de l’intervention de Mgr Crepy

  1. Benoît Sibille : la « crise de la sensibilité » et la reconnexion au monde

Le philosophe Benoît Sibille a analysé les causes de la crise écologique à travers notre insensibilité au monde non-humain. Nos pratiques actuelles, reliées à la pensée mécaniste issue de Descartes et à l’urbanisation, nous coupent de notre condition humaine, créée en relation et coévolution avec les tous les êtres vivants. Elles rendent invisibles le travail humain et l’origine matérielle des marchandises achetées, même pour notre subsistance. Pour y remédier, il a proposé de nous ré-ancrer dans le monde par de nouvelles pratiques, de transformer les structures sociales et d’abandonner le paradigme purement technique. Partageant avec le pape François l’idée d’une conversion écologique, il souligne le va et vient nécessaire entre nos pratiques et nos systèmes de pensée et nous invite à repenser nos gestes, au-delà du bon et du mauvais pour l’écologie, afin que ceux-ci révèlent le monde.

  1. François Euvé, s.j. : une théologie de la Création et de l’alliance

Le théologien François Euvé a exploré les ressources du christianisme pour répondre à la crise écologique. Partant de la critique d’une théologie anthropocentrique, il a rappelé que la Création est un tissu de relations où l’homme doit mieux comprendre son exception. Il est un sujet créateur suscité par la Parole et dans un rapport de dialogue, acteur parmi les autres créatures. Il a mis en avant une théologie trinitaire, où Dieu se livre dans le Fils et l’Esprit, invitant l’homme à une alliance responsable. L’enjeu est de passer de la maîtrise technique à une relation de dialogue et de décentrement, où la nature elle-même devient une médiation de la Grâce. Dieu lui-même ne s’est-il pas arrêté le 7ème jour, limitant ainsi sa maîtrise et confiant son pouvoir ? François Euvé a conclu sur une note d’espérance : l’accomplissement de la Création n’est pas un retour à un supposé âge d’or, mais un achèvement du monde, déjà en cours.

Les ateliers de co-création : vers un diocèse pionnier

L’après-midi a été consacré à cinq ateliers collaboratifs, animés par Paula de Wailly et Charles Duplatre (CERAS). Les propositions, notées sur des nappes en papier, ont mis en lumière des initiatives existantes (comme les groupes Église verte) et des pistes innovantes, malgré les défis de mise en œuvre. L’accent a été mis sur la nécessité de sortir de l’individualisme et d’inscrire l’action écologique dans une dynamique collective et spirituelle.

Des participants enthousiastes ont réfléchi à la traduction concrète de l’écologie intégrale dans :

  • Le lien Église – vie de la cité : initier un dialogue croyant et non croyant sur le sujet de l’écologie et renforcer les partenariats (s’engager dans des associations locales, partager des locaux, accueillir des AMAP etc.)
  • La liturgie et les sacrements : visibiliser dans nos assemblées la dimension écologique (louer et prier avec tous nos sens, prendre en compte les saisons dans le fleurissement de l’église, choix raisonné des espèces eucharistiques, …) et la spiritualité (ajouter le « péché écologique » dans l’examen de conscience).
  • L’alliance intergénérationnelle : éduquer les jeunes et créer des ponts entre les générations (randonnées intergénérationnelles et contemplatives, visite de jeunes aux personnes dépendantes).
  • La vie paroissiale : favoriser les achats responsables et les initiatives locales (jardins partagés, sobriété énergétique, s’appuyer sur les ressources Eglise Verte, etc.).
  • Les actions avec les personnes vulnérables : associer écologie et solidarité, en partant du vécu des plus fragiles, mieux les intégrer dans la vie paroissiale (covoiturage, repas partagés, fraternités).

Perspectives et espérance

Cette journée a confirmé que l’écologie intégrale est constitutive de notre foi, et est un chantier commun pour l’Église et la société. Les intervenants et participants ont souligné :

  • L’urgence d’être et d’agir, en s’appuyant sur les ressources de la foi et de la raison.
  • La force de commencer par des petits gestes, qui transforment les mentalités, pour nourrir une action collective qui transforme les structures.
  • L’importance de la solidarité, notamment avec les plus pauvres et les générations futures.
  • L’espérance, avec la conversion écologique vue comme un chemin de Salut déjà en marche.

En conclusion, l’anniversaire de Laudato si’ a été l’occasion de réaffirmer l’engagement du diocèse et d’imaginer des pistes pour devenir un territoire exemplaire. Une perspective prophétique : agir ici et maintenant pour construire le Règne de Dieu, en accueillant la Création comme un don à accomplir. Comme l’a rappelé Monseigneur Crepy, il s’agit de « mieux habiter la maison commune », en alliant foi, créativité et responsabilité.

Pour aller plus loin Les ateliers ont montré que la conversion écologique passe par une mobilisation de tous : clergé, religieux, laïcs, jeunes, et personnes vulnérables. Les prochaines étapes incluront la mise en réseau des initiatives, la formation continue, et l’intégration de l’écologie dans tous les aspects de la vie diocésaine. La journée s’est close sur un appel à devenir des « pèlerins d’espérance », portés par la conviction que chaque action compte pour un monde plus juste et durable.

https://www.egliseverte.org/
https://laudatosimovement.org/fr/