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Moi Daniel Blake, palme d’or 2016 pour une critique de la société anglaise


Pauvreté, fracture numérique, pour des héros du quotidien. Daniel et Katie pourraient être nos voisins. Quelle protection sociale pour notre société ? Quelle fraternité pour ne pas être identifié à ses difficultés au quotidien ?

Fiction dramatique de Ken Loach, parue en France en 2016

Durée : 1h35

Palme d’Or au Festival de Cannes 2016

5 prix et 12 nominations

la fiche imprimable avec minutage du film

Résumé

Daniel, menuisier, a fait une crise cardiaque. Le médecin lui interdit le travail alors que l’agence de recherche d’emploi le considère comme apte. Le film montre le parcours de cet homme apprécié de son entourage, profondément humain, en butte à une administration bornée qui oublie qu’elle s’adresse à des êtres humains. Son soutien d’une jeune mère plus en détresse encore que lui va le porter jusqu’au basculement pour crier au monde son incohérence. Le cercle vicieux se referme avant que la fraternité ne l’aide à se relever…trop tard ?

 

Remarques générales : le film se présente presque comme un documentaire par le dépouillement de la mise en scène.

La scène finale est un plaidoyer de la vision critique de la société pour le réalisateur.

 

Analyse

Personnages :

De nombreux personnages gravitent autour des deux héros principaux Daniel et Katie. Malgré leur pauvreté, ils ne sont pas complètement isolés. Ils sont l’un et l’autre dans une passe difficile de leur vie où l’argent manque mais ils ont un toit.

Le film commence sans image par un dialogue absurde (de sourds) où l’ironie n’a pas sa place, où le pouvoir de l’administration contraint à tout accepter pour ne pas se retrouver sans ressources.

Le film se termine également sans visage du héros puisqu’il est mort.

Mais dès les premiers mots, c’est la question du cœur qui apparait. Le cœur de Daniel est malade…mais ô combien généreux face aux sans-cœur de l’administration.

Comment la pauvreté est-elle montrée ? Que produit sur le spectateur le fait que les personnages semblent des gens que l’on peut croiser facilement ?

 

Les objets :

Daniel est menuisier : les outils, la présence du bois sous différentes formes, montrent ce qui l’a animé toute sa vie. Le crayon (de menuisier) reste son arme face à l’ordinateur.

Le téléphone et les écrans, petit à petit, isolent celui qui fait une démarche administrative.

 

Les lieux : entre l’agence pour l’emploi et les lieux d’habitation de chaque personnage, la rue prend une place importante. Les personnages se déplacent beaucoup, toujours à pied. Se retrouver à la rue serait-il une issue possible pour chacun ?

 

La bande son : la musique est très peu présente et peut faire percevoir le film plutôt comme un documentaire.

 

Propositions d’animation

Autour de la fraternité

Retracer le chemin parcouru par chacun des deux personnages principaux, de leur rencontre improbable à leur séparation définitive.

Comment la solidarité, l’humanité permet à chacun d’avancer malgré les épreuves ? souligner au fil du récit comment le soutien de l’un puis de l’autre permet à chacun de ne pas perdre pied.

 

Comment chaque personnage côtoyé dans le récit vient contribuer à manifester la place capitale de l’humanité nécessaire pour vivre même dans les situations difficiles ? (on pensera aux anciens collègues, à Ann l’employée qui se fait réprimander pour son humanité, les voisins, les accueillants de la banque alimentaire). Les chômeurs ne sont pas que des gens sans travail ! la vie continue par ailleurs !

 

Comment être en relation avec les autres si l’on ne sait plus qui on est : comment se manifeste le besoin d’identité dans le film ? Qu’en pensez-vous ? Que penser du titre du film ?

On pourra développer particulièrement l’analyse de la scène à la banque alimentaire en la revoyant.

Un témoignage d’association comme le secours catholique peut permettre de poursuivre l’échange : souvent des personnes accueillies par l’association, deviennent à leur tour accueillantes. Comment la main tendue à un moment difficile a changé leur vie ?

 

Autre résonance avec un extrait de “Fratelli tutti”, pape François, 2020, par exemple au n°77.

Quelle proposition nous suggère-t-il pour changer notre monde ?

 

Autour de la pauvreté, la précarité

Quels sont les besoins primaires à assurer pour permettre à chacun de vivre : un toit – de la nourriture…Comment est montrée la gestion des chômeurs en Angleterre ? Quels moyens pour remettre au plus vite les gens au travail ?

Qui a la responsabilité de cette situation sociale pour le réalisateur ?

 

Comment l’épreuve du chômage marque-t-elle le quotidien ? Comment le réalisateur montre-t-il l’humiliation ressentie, la discrimination de ceux qui n’ont aucun moyen de lutter contre la machine administrative ? (Il pourra être nécessaire de préciser les différences dans la politique de protection sociale vis-à-vis des chômeurs en Angleterre par rapport à la France)

Avec des lycéens, on pourra développer l’échange autour de justice sociale et cohésion sociale et les enjeux de la politique économique d’un état.

 

Qu’est-ce qui est montré de la dignité des personnes ? Comment se manifeste leur désir de travailler et ne pas profiter du système alors que l’administration ne cherche qu’à traquer les fraudeurs ?

 

Quelles sont les conséquences montrées par le manque d’argent sur l’éducation des enfants ? sur les repères moraux, les valeurs ? en fait sans doute sur l’identité même des personnes ?

Comment les tentations sont gérées toujours dans le but de protéger les enfants ?

Analyser la scène de la banque alimentaire : quelles réactions provoque-t-elle en nous ?

Quelle évolution éventuelle si nous sommes confrontés à la grande pauvreté ?

 

Comment est montrée la difficulté d’accepter de l’aide des autres ? Pour Katie, pour Daniel notamment dans la scène avec Daisy ?

Des résonances bibliques peuvent être proposées en écho à ces situations : comment Jésus est présent aux côtés de celui qui n’a rien ? On pourra échanger sur l’histoire de l’aveugle : « Que veux-tu que je fasse pour toi ? »

 

Quelle place pour la culture pour ces personnes en situation de grande précarité ?

 

Que dénonce en fait le réalisateur ? Le film ne semble pas être une caricature qui rassemblerait tous les maux. Il y a une volonté de réalisme et les acteurs sont naturels et spontanés.

 

Éventuellement, on pourrait prolonger l’échange avec des jeunes en s’interrogeant sur les questions de réussite : qu’est-ce que réussir sa vie, réussir dans la vie ?